J'enlève mon t-shirt et mis celui qui faisait office de haut de pyjama, par-dessus un bête caleçon. Je me jette à moitié sur mon lit, les bras écartés. Allongé sur le dos, je regarde le plafond. Je ne veux pas dormir pour me retrouver dans le noir mais j'ai sommeil. Soupirant, je me glisse sous la couverture, éteins ma lampe de chevet puis ferme les yeux. Je suis aussitôt dans le noir mais je sais que je ne dors pas encore...Ou pas. C'est un peu compliqué de dire si je dors ou pas étant donné que je suis toujours dans le noir, lorsque je ferme les yeux. Et, que je sois éveillé ou endormi, j'entends toujours les pensées des gens. Je me retourne. OK, je ne dors pas encore.

J'ouvre les yeux. Je suis sûr d'avoir ouvert les yeux pourtant, tout est noir.
« Papa, où est maman ? Pourquoi disent-ils tous que nos mères sont mortes ? Papa, où es-tu ? Papa !! »
Je m'assois, où du moins je crois. Si seulement je pouvais faire apparaître du pop-corn. Je soupire et finis par m'allonger. J'entends la voix de la jeune fille. Elle panique, appelle son père. Puis, tout un coup, sa voix paraît plus distante. Elle s'est réveillée.
Je cherche son esprit et l'entends pleurer. L'avantage, lorsqu'on a vécu ma vie, c'est que je n'ai personne à regretter.
« Qu'est-ce qu'il fout ? Il a cinq minutes de retard ! »
Je souris. Un autre couple qui se retrouve dehors afin d’échanger un dernier baiser avant d'aller dormir.
Je soupire. Ma vie romantique est aussi vide que cet endroit où je me retrouve, chaque nuit. A part quelques coups d'un soir où des personnes avec qui je passe la nuit de temps en temps, rien de sérieux. Il y a des fois où j'aimerai vraiment être un mec normal que personne ne craint. Tout le monde ou presque me trouve bizarre et personne n'ose m'approcher réellement.
Je me lève et commence à marcher, quittant le couple enfin réuni qui s'embrasse à pleine bouche pour écouter les doux rêves d'une nouvelle. Elle semble heureuse, elle. Ça doit bien être la seule, d'ailleurs. Dans le noir, je marche lentement. J'ai peur de me cogner même si je sais qu'il n'y aura jamais rien pour me bloquer le passage.
Je m'allonge à nouveau sur le sol, fatigué de marcher sans but. Chaque soir, c’est le même rituel : marcher en écoutant les gens. Chaque soir, je fais des pauses, inutiles, m'allongeant par terre. Tout est normal. Je donnerai n'importe quoi pour qu'on vienne me déranger. Rien qu'une petite lu...
Une lumière apparaît, plus loin. Je me redresse, surpris. C'est la première fois que je vois autre chose que du noir, ici. Je me lève et vois une jeune fille marcher vers moi, une boule de lumière dans le creux de la main. Je fronce les sourcils. Qu'est-ce qu'elle fout là, elle ?
Elle ne m'a pas vu, je suis trop loin et pas encore éclairé par sa lumière. Je repousse les pensées des autres élèves et m'approchent d'elle :
- Tu peux m'expliquer ce que tu fous là, toi ?

Non mais elle nous raconte quoi, l'illuminée, là ?! D'où elle squatte mon "rêve" ??!! Ah mais attendez...Mais je rêve pas, moi ! Mais qu'est-ce qu'elle fait là ??!!
Je soupire et m’accroupis à terre en ébouriffant mes cheveux. OK, je suis bizarre, mais elle, elle est pas mieux. Comment ça se fait qu'elle squatte mon "rêve" ? Et elle osait faire ça sans demander la permission au "propriétaire" du rêve ?
Je l'observe discrètement. Jeune, autant que moi, je dirais. Plutôt belle.
« Il est beau... »
Je me retiens de sourire. Même si j'ai l'habitude d'entendre ça, ça me fait toujours plaisir. Ses mains apportent une douce lumière et je ne peux m'empêcher d'être hypnotisé. C'est la première fois que je vois de la lumière, lorsque je dors. Je me relève et m'approche.
Elle semble légèrement méfiante et je souris, sachant que je suis beaucoup plus beau lorsque je sourie.
J'éloigne les pensées des autres, faisant le silence autour de nous. Cet effort m'oblige à me concentrer et donc à froncer légèrement les sourcils. Je sens un mal de crâne poindre le bout de son petit museau.
Pourquoi j'éloigne les pensées ? Parce que j'ai peur qu'elle les entende et que je refuse que quelqu'un d'autre que moi entende les pensées des pensionnaires. J'ai beau entendre les pensées et les garder secrètes, je ne suis pas sûr que tout le monde fasse comme moi...
- J'ai pas l'impression de t'avoir déjà vu, t'es...Attends, on est pas dans la même classe ?! Maintenant que j'y pense, j'ai l'impression de t'avoir déjà vu...Bref, en tout cas, je suis Park Hyo Joo, je lis dans les pensées, et toi ?
J'ai du mal à retenir les personnes que je ne fréquente pas régulièrement. C’est surtout les noms que j'ai du mal à retenir. Essayez de retenir des prénoms lorsque tous ceux des habitants de l'école tournent dans votre crâne ! Peut-être quelqu'un d'autre y arriverait, mais pas moi.
Cependant, avec elle, j'ai vraiment une impression de déjà-vu. Même si je suis très curieux, elle ne devrait pas rester ici. J'ai peur qu'elle ne découvre trop de choses sur moi. Seuls les dirigeants de l'école savent ce que j'ai vécu. Et je ne tiens pas à ce que mon passé devienne THE passé à connaître...
Il faut qu'elle parte. Sur cette pensée, je laisse tomber mon masque de gentil garçon plutôt dragueur.
- Bref, c'est pas que je voudrais paraître méchant mais j'apprécierais que tu partes. T'as rien à faire ici, c'est mon ''rêve''. Tu n'es pas à ta place alors pars.
J'ai l'impression d'avoir été plutôt méchant, là. Elle semble blessé et je soupire.
- Désolé, je voulais pas te blesser mais je ne veux pas que tu découvres trop de choses. Et puis, tu serais plus à l'aise dans un rêve plus joyeux, si tu tiens tant que ça à parasiter un rêve...Surtout que moi, je rêve même pas, alors t'es pas vraiment au bon endroit !
Merde...Je suis trop bavard. A tout les coups, elle va me demander comment ça se fait que je rêve pas !