Le premier cri. C’est là que toute histoire commence. Le premier cri de son héros. Celui de JongDae n’eut pas lieu en Corée du Sud, non. Il eut lieu à l’autre bout du monde. A Prague, plus précisément. L’Europe n’était pas si belle qu’on ait pu l’entendre dire par ici. Un monde en guerre, et tous ces morts… La guerre, la famine, la peur. Ce bébé qui naissait au milieu de tout ça représentait à la fois l’espoir mais aussi l’atrocité de la vie, car partout autour de lui on ne donnait pas cher de sa peau dans un monde aussi dévasté par la deuxième guerre mondiale.

Finalement après le séjour en République Tchèque de ses parents pour raisons professionnelles, ils étaient rentrés en Corée du Sud en emportant avec eux cet enfant miraculé, et sa vie fut sauvée dans un premier temps. Il passa les trois premières années de sa vie au sein d’une famille plutôt aisée. Ses parents étaient tous deux scientifiques, métier qui à cette période était plutôt bien payé et leur rendait donc la vie facile. Puis arriva la catastrophe. Il ne sait plus comment, ni pourquoi, il était bien trop petit pour s’en souvenir, mais JongDae et ses parents échappèrent à la mort atroce qui aurait pu les emporter lors de l’explosion. Un miracle, peut-être. Un coup de chance. Mais il aurait sûrement mieux valu pour lui que son expérience de la vie s’arrête là. Car après la catastrophe, JongDae n’a plus du tout eu la même vie.

Le pays était en ruines il ne restait plus que des cendres et des pierres, de la poussière radioactive, des morceaux de bâtiments devenus inhabitable et dans lesquels pourtant les gens cherchaient refuge. Les radiations transformaient les gènes des êtres humains et les transformaient en monstres. Il grandit au milieu de ces mutants, ces enfants qui avaient d’étranges pouvoirs qu’il ne comprenait pas. Il était jaloux, car lui n’ayant aucun pouvoir se sentait impuissant, inférieur face aux autres enfants. Alors que le pays se reconstruisait autour de lui, il grandit dans la misère, triste et envieux de ces spécimens qui lui étaient préférés.

Il a connu la faim. Il a connu la souffrance, physique et morale, le froid de l’hivers qui le rendait malade, la soif pendant les grandes chaleurs en été et le manque d’argent qui empêchait sa famille de pouvoir prendre soin de lui comme une famille normale. Le pays se relevait peu à peu, renaissant de ses cendres avec difficultés, et JongDae de son côté luttait pour sa survie. Si jeune, si petit et si fragile, et déjà il avait le regard d’un adulte tant la vie avait déjà été dure avec lui. Oh bien sûr, il ne se considérait pas comme le plus malheureux des enfants. Il avait toujours en tête le fait qu’il y a toujours pire que soi. Au moins il était en vie, il avait ses parents, il se faisait des amis. Un enfant même dans la pire des situations peut trouver le moyen de jouer avec les autres.

C’est d’ailleurs en jouant avec d’autres enfants qu’il apprit à apprécier les Aegis. Peu à peu sa rancœur envers eux se dissipa, et même s’il se permettait de temps en temps de faire des essais pour voir si les radiations lui avaient donné ne serait-ce qu’un peu de pouvoir, il n’a jamais eu le moindre signe, à son grand désespoir. Il aurait aimé être comme eux, avoir le sentiment de servir à quelque chose, de pouvoir donner un sens à sa vie et être la fierté de ses parents. Bien sûr ça ne l’empêchait pas d’apprécier leur compagnie, il se fit même quelques véritables amis parmi eux au fil des années.

Arriva ensuite la seconde catastrophe de sa vie. Un attentat Katharsis, sur les lieux où se trouvaient à ce moment-là ses parents. Il avait alors vingt-deux ans, et était toujours aussi attaché à ses parents qu’il ait pu l’être en étant petit. Ils étaient tout ce qu’il avait de bien concret. Lorsqu’il apprit qu’ils étaient sur les lieux de l’attentat, il s’y précipita, laissant en plan tout ce qu’il était en train de faire. Ses parents n’étaient pas sur la liste des rescapés. Il hurla qu’il voulait qu’on continue les recherches, que peut-être étaient-ils coincés sous les décombres, mais on lui répondit par la négative, le menant jusqu’aux corps qu’on avait retrouvés sans vie. La vision des visages blafards des cadavres de ses parents furent sûrement la pire expérience de toute sa vie. Ce fut la seule fois, la seule et unique fois où on ait pu le voir pleurer. Agenouillé à côté des corps, il ne pouvait contenir ses larmes. Il refusait de les reconnaître alors qu’il savait bien que c’étaient eux, il n’y avait aucun doute. Toute sa vie s’écroulait.

Quelques temps après le drame, le temps de faire son deuil, le jeune homme avait mis au placard ses idées noires et décidé d’opter pour une façon plus glorieuse de rendre hommage à ses parents. Lui qui voulait les rendre fiers, qui voulait être quelqu’un d’important, ne pouvait pas baisser les bras. Il se reprit en main, et décida d’ouvrir un bar pour permettre aux Lachesis et aux Aegis de se retrouver autour d’un verre, de discuter, échanger idées et informations. Il n’avait pas l’âme ni la force d’un soldat, il n’avait aucun pouvoir, mais ainsi il pouvait contribuer. C’est ainsi que le Kratos vit le jour, et que Bang JongDae, le garçon invisible aux yeux des autres, obtint son propre rôle dans l’Histoire.