Citation :

❝Stealing is bad, you know?❞

Yao Li Mei & Kim Yoo Hee.

3 Mars 2049, milieu d'après-midi.

« Regarde-moi, Yoo Hee. Regarde-moi droit dans les yeux et souviens-toi à jamais de ces paroles. Lorsque tu es face à un ennemi, il faut toujours que tu restes maître de toi-même, que tu caches ta colère ou ton dégoût. Lorsque tu es face à un ennemi, il faut toujours que tu lui fasses croire que ce qu’il te dit ou ce qu’il fait n’a pas d’effets sur toi. Compris ? »
Je me souvenais très bien que, petite, j’avais hoché la tête et, à ce moment-là, j’avais eu la sensation que ces paroles resteraient ancrées à jamais en moi. Même maintenant, je me souvenais parfaitement des paroles que mon père avait prononcées, le jour où on avait fêté mes six ans.

Je soupirais en constatant que mes deux assaillants étaient morts. Il allait falloir que je fasse rentrer ces paroles dans le crâne de Queen. Quoique…C’était aussi le mien alors, théoriquement, elle le savait aussi…Elle l’avait sans doute juste ignoré, comme toujours. Claws vint se blottir contre mes jambes et je lui souris en caressant sa tête. Ou pas, au final. Mes mains étaient pleines de sang. J’avais oublié que Queen avait gentiment saigné les deux hommes…
Mon ami lécha gentiment mes mains et je sourie à nouveau, me penchant pour déposer un baiser sur sa tête douce.
- Tu es un ange.
Il me regarda droit dans les yeux et ceux-ci clignèrent. Une louve allaitant ses petits. Un loup arrive et frotte sa truffe contre celle de la femelle. Je souris un peu plus et me relevais, époussetant mes vêtements au passage. Je regardais sa patte ensanglantée et m’accroupis, observant la blessure.
- Tu pourras marcher ?
Il me mordilla l’oreille affectueusement et je soupirais. Me redressant, je récupérais mon sac et abandonnais les corps ici. Des animaux se feraient un plaisir de faire disparaître toute trace de ces chasseurs de loups.

J’avançais lentement dans les allées du marché noir, observant tous les étalages. Ce marché était vraiment intéressant, selon moi. Il était impossible de ne pas trouver quelque chose d’intéressant, ici. En plus, il était peu surveillé donc un endroit presque sûr, pour nous, Katharsis en fuite.
Claws marchait à côté de moi, ayant arrêté de boitiller depuis environ cinq minutes. Les marchands nous regardaient avec suspicion. La plupart me connaissait puisque je venais souvent vendre mes prises mais il n’empêchait que les taches de sang sur mes vêtements et Claws les mettaient mal à l’aise. C’était compréhensible. Je puais la mutante à plein nez alors le fait que je sois tachée de sang plaisait pas. Après tout, qui disait que cet endroit était vraiment non surveillé ? Ce n’était pas parce qu’on ne se faisait pas arrêter ici qu’on n’était pas surveillés.

Je m’arrêtais devant un étalage de sacs et observais les différents modèles. Mon sac commençait à se faire vieux, il était peut-être temps que je le change…La queue de Claws me fouetta la jambe et je le regardais, surprise. Son regard était fixé sur un étalage, un petit peu plus loin. Je fronçais les sourcils alors que je vis une jeune femme glisser un objet dans sa poche, discrètement, alors que le marchand discutait avec sa voisine. Aucun d’eux n’avaient vu le geste de la jeune fille. Elle s’éloigna calmement et, sans réfléchir, je la suivais de loin, le plus discrètement possible. Elle se glisse dans des ruelles et je profite du fait qu’on s’éloigne du marché pour m’approcher, toujours aussi discrètement. Dès que je le peux, je la saisis par le bras et la force à se retourner.
- Tu sais que voler est une mauvaise chose ?

Elle se dégagea et m'engueula quasiment tout de suite. Je fronçais mes fins sourcils. Cette fille n'était sûrement pas une Aegis, vu ses paroles. Et encore moins une Lachesis. A moins qu'elle soit stupide, elle devait très bien savoir qu'elle a tout intérêt à surveiller ce qu'elle disait sur le gouvernement, constamment. Ou sinon, elle risquait de se retrouver derrière les barreaux. Voire pire.

J'ouvris la bouche pour parler mais elle continua et je referma doucement ma bouche, l'écoutant. Claws et moi échangeâmes un regard. C'était bien la première fois qu'on me demandait si j'avais peur de me promener avec lui...Je souris légèrement et caressais sa tête en relevant la mienne fixant la jeune fille.
- Il ne me fera aucun mal, je le sais. Et je ne pense pas que ce soit illégal. Ou, du moins, on ne m'a jamais demandé de m'en débarrasser.
Je l'observais et remarquais qu'elle n'avait rien dit sur mes vêtements tâchés de sang...
- Dis-moi, tu dois être une Katharsis, pour parler du gouvernement ainsi, n'est-ce pas ? Personne d'autre n'aurait osé parler de lui avec une telle insolence. Ou sinon tu es vraiment stupide de dire ce que tu penses de tes patrons à une inconnue...
Même si elle risquait d'être vexée ou de prendre la mouche, je m'en fichais. J'avais totalement raison et, si elle n'était pas aussi stupide que je le pensais, elle le savait aussi bien que moi.

Claws se plaqua contre mes jambes et je baissais le regard, voyant qu'il ramenait sa patte blessée contre lui. Il devait savoir qu'il allait avoir du mal à marcher, bientôt, s'il ne la reposait pas. Je me retins de grogner de frustration. J'aurais dû le soigner avant de partir. Il m'ignorait en fixant du regard la voleuse et je le regardais à nouveau.

Elle n'avait définitivement pas le profil de la fille pauvre. Elle était propre, ses vêtements n'étaient pas des loques...Non, elle vivait définitivement bien. Ce qui me fit hausser un sourcil. Pourquoi volait-elle ? Surtout si ce n'était que quelques couverts...Ils ne coûtaient généralement pas très cher, pourquoi prendre le risque de se faire prendre ? Je décidais d'assouvir ma curiosité. Parce que c'était réellement bizarre.
- Si tu n'as pas assez d'argent sur toi, je peux t'en passer, si tu veux. Comme ça, tu n'auras pas volé ces objets dont j'ignore l'identité mais on te les aura offert, plutôt. Ce serait mieux, tu n'es pas d'accord ?
Je me forçais à sourire gentiment, essayant d'oublier que si je faisais ça, je ne pourrais pas finir mes courses et ma journée aurait donc été inutile. Et les autres, au camp, risquaient de ne pas apprécier le fait que j'avais acheté un truc pour une fille afin qu'elle s'endorme en ayant bonne conscience, ce soir...Je n'avais plus qu'à espérer que, si elle acceptait, les objets ne coûtent pas trop cher. Sinon, j'allais vraiment me faire détruire. Et le fait que la fille était sans doute une Katharsis risquait de ne pas faire passer la pilule...