Il était une fois, un petit garçon. Maigre et malade, tout le temps. Avec une bouille d'enfant et des yeux d'adulte. Un enfant grandissant au milieu des décombres et des déchets radioactifs, affamé, fragile. Et pourtant, ce petit garçon, il a tenu. Ce garçon aujourd'hui est devenu un adulte avec des yeux d'enfant. Un homme traumatisé par l'enfance qu'il a vécu, et par la perte de ses parents. Il passe la majeure partie de son temps dans son bar, à écouter les conversations et à servir les clients. Il ne parle pas beaucoup, mais lorsqu'il ouvre la bouche il devient incontrôlable et dit des choses parfois totalement absurdes. Certains pensent qu'il est fou. Mais en fait, il est plutôt perturbé, c'est tout.

L'amour ? Pourquoi pas. Mais il garde ses distances. Il n'est pas le genre de personne à s'engager. Ses relations ne durent généralement pas longtemps, parce qu'il manque d'investissement et de proximité. Mais ça ne l'empêche pas de s'amuser quelques fois, et de draguer lorsque l'envie lui prend. Disons qu'il ne pense à rien de sérieux pour l'instant. L'amitié, c'est pareil. Il peut se montrer amical avec les gens, les écouter lorsqu'ils ont besoin de parler mais il est rare qu'il considère réellement quelqu'un comme son ami. Pas que ce ne soit pas quelqu'un de sociable, au contraire. Il aime bien la compagnie des gens, à condition de ne pas s'attacher, car il a une peur bleue de l'abandon. Quand on n'a personne, au moins on ne perd personne.

Il est capable aussi bien d'être doux comme un agneau, que de mettre dehors ceux qui troublent l'ambiance de son bar avec un bon coup de pied au cul, qu'ils soient humains ou mutants. A ce propos, il ne considère pas, ou disons plutôt qu'il ne considère plus, les Aegis comme des êtres différents. Il n'en veut qu'aux Katharsis car c'est eux qui lui ont enlevé ses parents. Car sans leurs attentats stupides, il n'aurait pas ce deuil qui pèse encore aujourd'hui, quatre années plus tard, sur ses épaules. Même si ses parents n'étaient pas les cibles, qu'ils ont juste eu la malchance d'être au mauvais endroit au mauvais moment.

Cet homme qui a vu des centaines de visages défiler sous son nez, sans même avoir à bouger. Derrière son comptoir, la tête dans les nuages, certains le voient seulement comme un élément du décor, d'autres comme une machine à café, et d'autres encore, comme l'être humain qu'il est. Mais peu lui importe, il sait bien que sa personne n'est pas si importante que celle d'un soldat ou d'un mutant, même de bas niveau. Si son bar est un excellent lieu de rassemblement pour ces derniers, et même pour d'autres personnes qui voudraient simplement y passer un bon moment autour d'un verre ; lui en tant que personne n'a rien d'extraordinaire. Pas même la moindre trace de pouvoir, aucun signe de capacité hors du commun, si ce n'est peut être cette faculté qu'il a à cacher sa peine derrière un masque de doux rêveur.